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Devenir une autre ...



Il fait nuit, nuire noire, sans étoiles ou pleine lune pour me guider. Tant mieux ! L’idée est que je puisse être la plus discrète possible. Normalement, j’ai pensé à tout. Voyons si cela est vrai.


Ici à l’hôpital psychiatrique, près de deux-cent médecins, infirmières, psychologues, aides- soignants entre autres y travaillent. J’ai longuement planqué ici à Toulouse il y a deux semaines pour observer minutieusement les allées et venues. Je suis venue plusieurs fois, sous divers aspects, tantôt blonde ou brune, cheveux courts ou longs, à plusieurs heures de la journée pour observer à l’intérieur et à l’extérieur ce qu’il se passait dans cette ville dans la ville.


Les personnels soignants, sauf médecins qui ont des horaires atypiques, travaillent en horaires décalés. Le roulement se fait aussi chez les aides-soignants qui représentent la grande majorité du personnel soignant. Les horaires sont les suivants : de cinq heures du matin à treize heures, de treize heures à vingt et une heures et de vingt et une heures à cinq heures du matin.


Il y a trois mois déjà, j’ai eu l’idée de me faire passer pour une élève aide-soignante. J’ai été sur le site de la principale école du coin et ai vérifié que les élèves font un stage dans leur cursus. Ils en font six au total pendant leurs études. J’ai alors recopié sur l’ordinateur le logo de l’école, me suis fait passer pour l’élève du Professeur Souani et ai fait une demande de stage dans le cadre de mes études. J’ai falsifié mon écriture pour celle du professeur qui a fait de moi sa meilleure élève, souhaitant se spécialiser en psychiatrie et voulant faire mon stage obligatoire de 4 semaines. J’ai reproduit le tampon de l’école et ai imaginé ma demande auprès du chef de service de la psychiatrie de l’hôpital. Je me suis dit que ça ne marcherait pas forcément et avais prévu un autre plan au cas où.


Mais il y a un mois environ, j’ai reçu un mail m’indiquant que ma demande était acceptée et que je pouvais remplir mon dossier administratif. C’est donc sous l’identité d’Anne Guérin que j’ai renvoyé ma demande précisant que cette nuit serait ma première nuit de stage à l’hôpital. J’ai hésité sur l’aspect physique à adopter. Finalement



Il fait nuit. Nuit noire, sans étoiles ou plein lune pour se repérer. Tant mieux l’idée est que je puisse être la plus discrète possible. Normalement, j’ai pensé à tout. Voyons si cela va se passer comme je l’ai écrit dans mon carnet.


Ici à l’hôpital psychiatrique, près de deux cent médecins, infirmières, psychologues et aides -soignants entre autres y travaillent. J’ai longuement planqué ici à Toulouse il y a deux semaines pour observer minutieusement les allées et venues. Je me suis assise ici et là plusieurs fois, sous plusieurs identités, à plusieurs heures du jour et de la nuit, pour observer à l’intérieur et à l’extérieur ce qui se passait. Les personnels soignants, sauf médecins qui ont des horaires atypiques, travaillent en horaires décalés. La roulement se fait aussi chez les aides -soignants. La répartition se fait ainsi : une équipe de 5h à 13h puis se relais celle de l’après -midi jusqu’à 21h et enfin la nuit qui constitue le troisième tiers.


Il y a trois mois déjà, j’ai eu l’idée de me faire passer pour une élève aide-soignante. J’ai été sur le site de l’école de référence sur Toulouse et ai vérifié que les étudiants font un stage. Dès lors que j’ai vérifié cette information, j’ai mis la première partie de mon plan à exécution. J’ai utilisé les services de Word sur l’ordinateur pour copier-coller le logo de l’école et ainsi me créer du papier à entête. En regardant la liste des professeurs, j’ai ensuite choisi d’être l’élève du plus prestigieux des professeurs, en l’occurrence, le Professeur Souami. Changeant mon écriture pour la sienne, j’ai demandé en son nom à ce que ma plus brillante élève, puisse faire son stage de dernière année au Bloc 3 de l’hôpital psychiatrique de Casselardit. C’est ainsi qu’Anne Guérin est née sous ma plume de menteuse professionnelle. J’ai reproduit, avec difficulté il faut le dire, le tampon officiel de l’école et ai envoyé mon courrier au chef de service de l’hôpital psychiatrique.


Il y avait une forte possibilité que cela ne marche pas et j’avais déjà écrit un plan B pour me débarrasser de Pauline. Mais il y a un mois environ, j’ai reçu un mail m’indiquant que ma demande était acceptée. Et que je pouvais remplir mon dossier administratif en précisant les dates de stage voulue. J’ai aussitôt appelé la sœur de Pauline pour lui dire que je viendrais à telle date, ce qui correspondait à mon premier jour de stage. Le hasard a voulu que je commence de nuit, m’obligeant à construire d’autant plus précisément mon plan car la nuit on peut moins se fondre dans la masse pour s’envoler discrètement.


Je suis venue depuis à de nombreuses reprises sur Toulouse. D’abord pour analyser au mieux les lieux de ma machination machiavélique mais aussi pour faire l’ensemble des démarches administratives. C’est ainsi que j’ai créé une boite aux lettres en poste restante à Toulouse afin de m’assurer de recevoir le courrier et notamment le fameux badge de l’hôpital, représentant le sésame pour rentrer sans souci. Sur mon dossier administratif, je suis donc devenue Anne Guérin, cheveux courts, bruns et portant de petites lunettes rondes. Une petite étudiante de 25 ans, en troisième année d’école d’aide-soignante, bonne élève et souhaitant se spécialiser en psychiatrie.


Dès que j’ai reçu la confirmation écrite que ma demande était acceptée, j’ai appelé la sœur de Pauline pour savoir si je pouvais passer ce weekend d’Octobre pour venir la voir. Le plan était simple : passer l’après-midi avec elle et revenir la nuit en tant qu’Anne pour finaliser mon funeste projet.


J’ai bien insisté auprès de Pauline après cette journée et de sa sœur sur le fait que je ne pouvais pas rester longtemps et que je devais rentrer le soir même sur Paris et j’ai donc demandé à ce qu’elles me déposent à la gare de Toulouse, montrant à plusieurs reprises mon billet de train pour un retour à 18H10. Chaque acteur de ma pièce de théâtre criminelle a son rôle à jouer et la sœur de Pauline fera un excellent alibi le moment venu. Devant la gare, je leur envoie un baiser de loin et file en direction d’un composteur pour valider mon billet qui sera donc pointé à l’heure de 17H53. Officiellement je suis donc prête à monter dans le train qui va me ramener sur Paris. Vraisemblablement je ne pourrais pas être accusée d’être l’auteure de l’odieux crime dont Pauline va être victime cette nuit.


J’attends que le train parte de la voie 3 et file calmement vers les toilettes. Enfermée et assise sur le siège des toilettes je me change en un nouveau personnage. Cette fois-ci je suis Jeanne Manson et je vais chercher la voiture que j’ai louée à la gare de Toulouse. Je vérifie que mes faux papiers, carte d’identité et permis de conduire, sont à leur place. J’ai fait le bonheur ce mois-ci de mon receleur de faux papiers qui, peu bavard et très conciliant, me permet de changer d’identité à mon bon vouloir.


Dans quelques heures, je vais pouvoir mettre à profit tous les efforts entrepris pour assassiner Pauline et devenir enfin libre de ce poids. Pauline restera celle qui aurait pu ne pas mourir dans cette trajectoire meurtrière, celle qui aurait pu échapper à ma justice car ayant souffert de la justice des Hommes. Mais j’ai eu beau lui trouver des circonstances atténuantes, réfléchir à l’absolution de ses fautes, je la crois entièrement responsable de la mort d’Elisa.


Elle a tué sa propre fille. Elle a tué son propre bébé. Elle a tué sa fille unique.


Elle sera tuée dans quelques heures.


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